En remontant le Brésil, de Salvador de bahia à Cayenne.

Itaparica, la Baie de Tout les Saints, nous avions pensé à une escale de quelques semaines nous y avons construis une vie. Il ne nous est jamais arrivé de rencontrer un bateau n'ayant pas aimé le mouillage d'Itaparica. Nous l'avons quitté le 9 octobre. Bien tard dans la saison. François voulais voter pour les premières élections depuis qu'il est brésilien. Le vent étant annoncé Est nous pensions arriver à passer en un bord de près. Il s'est finalement établi Nord-est, ce qui est son régime normal, mais cela nous a obligé à tirer des bords pendant quatre jours. A la fin de la première nuit le pilote automatique est tombé en panne. Personnellement j'aurais fait demi tour, vent de face, mer formée, obligé de barrer jours et nuits, mais pour François il était hors de question de rentrer à Itaparica et cela sans rapport avec la navigation. Nous avons donc passé en mer quelques jours soutenu physiquement, mais le moral a assez bien tenu. Le troisième jour nous avons tenté une entrée dans la ville d'Aracaju mais dans une mer très formée nous n'avons pas trouvé le chenal. Nous sommes donc reparti vers le large.

Finalement nous avons touché terre à Barra de São Miguel, à 260 miles au Nord-est de Salvador et quinze miles au sud de Maceió. Il s'agit d'un fleuve dont l'estuaire est fermé par un récif de près de cinq kilomètres. Chance pour les navigateurs il y a une brèche d'une vingtaine de mètres de large tout à fait au sud. L'ami qui nous a indiqué l'endroit nous a parlé d'une bouée rouge qui marque la passe. La mer s'en était occupé et il n'y a aucun moyen de trouver le passage au milieu des brisants. Nous effectuons plusieurs passages mais il ne semble pas y avoir de solution. Peut être va-t-il falloir repartir au large de nouveau, toujours sans pilote. A quelques distances nous apercevons un pêcheur, approchons jusqu'à être à porté de voix. Il nous propose de nous guider en fin d'après midi au moment de la pleine mer. Magnifique entrée, la passe puis l'étroit chenal entre le récif et la plage. Avec un coefficient de marée assez faible nous avons eu trois mètres d'eau. Trouver un abri est un des plaisir de la navigation, la mer se calme, le bateau s'apaise, le corps réalise que la prochaine nuit sera complète. Faire un repas, se laver, se déplacer, reprennent un sens plus commun. Cette fois c'est sûr, après une escale de douze ans nous avons réussi à quitter Itaparica. Maintenant pour pouvoir continuer il faut s'occuper du bateau, les deux annexes sont troué, le moteur à un problème de refroidissement, il faut recoudre les voiles, le pilote ... L'endroit est idéal pour cela. Le propriétaire et l'équipe de la marina nous ont accueilli les bras ouverts. Le cadre est de falaises d'ocre, de mangrove et de plages de sable. La ville est un village de

pêcheurs qui a grandi en gardant son rythme de vie. Pour les problèmes techniques Maceió, capitale de l'Alagoa, est à moins d'une heure de route. Il faut surtout que l'on s'occupe de nous. Quitter un lieu aimé, inventer de nouvelles relations avec la mer, entre nous, laisser la maison et le jardin, il va falloir prendre un peu de temps. Un mois pour se remettre de quatre jours de mer. Enfin nous partageons un dernier plat de coquillages avec nos voisins pêcheurs, un peu de nostalgie s'installe déjà, nous reprenons la mer. La pleine mer était prévu pour quatorze heure évidemment nous avons pris du retard et nous sommes sortie avec le courant de face et une mer forte. Les coquillages ne m'ont pas porté chance. Impossible d'envisager une nuit en mer. Nous nous replions sur Maceió, j'y dormirai deux jours.

Trente miles nord nord-est est nous arrivons à Maragogi. Tout les tuyaux ne peuvent pas être bon. Effectivement l'entrée est facile mais il n'y a aucun abri. Nous avons l'impression d'avoir mouillé en pleine mer. Après une nuit agitée nous partons au levé du jour. Soixante miles d'une belle navigation, un bord de bon plein, et nous atterrissons à Suap. Un grand port commercial construit au milieu de la lagune dans les années 70. Mais tout au fond du port nous trouvons un charmant mouillage entre deux petites îles. La marée haute et les photos satellite nous permettent d'accéder au village de pêcheurs devenue une petite station balnéaire. La plage est accessible en bus, l'endroit est tranquille et populaire. Un long cap granitique s'avance dans la mer, l'occasion de belles balades et d'impression de Corse. Il est facile de passer une semaine ici.

Un petit saut de trente miles et nous voilà à Récif. Le carnaval de Récif est celui qui nous correspond le mieux, lieu de rencontre des cultures de l'intérieur de l'état Pernambuco, festival de frevo. C'est la première fois que nous sommes ici en dehors du carnaval, le saudade est partout présent. La marina est en faite un ponton abandonné mais dans un endroit sûr et gardé. Marchés, églises, musées nous faisons du tourisme avec plaisir.

Un dernier bord de bon plein avant l'étape tant désirée de Jacaré. C'est ici que le vent et le courant vont devenir favorables, ici que nous allons rencontrer d'autres voiliers. Nous arrivons sur des routes de navigation fréquenté. Une nouveau départ pour notre voyage, passé Jacaré il n'y a plus de possibilité de repartir vers le sud.

Port d'arriver de la transatlantique, superbe abri pour qui vient du sud, tout près de João Pessoa la capitale du Paraíba, c'est un lieu de rencontre de navigateurs chaleureux et la chance nous sourit, nous rencontrons Claude et Michèle, ils ont navigué plusieurs années les Antilles et sont près à partager leurs expériences. Le programme que nous établissons ne sera évidemment pas respecté mais notre perception des contraintes de navigation et des détails de la géographie des Antilles se sont nettement amélioré. De João Pessoa je me souviens avec plaisir du couvent de São Francisco. Les lions qui en protègent l'entrée ont des airs chinois. Probablement au début du XVII ème siècle le supérieur qui a fait construire ce couvent dans une petite colonie de peuplement au milieu de la forêt avait déjà été en mission en Chine. Il ne me semble pas que ces hommes soient admirable mais courageux, ils l'étaient. De Jacaré nous filons directement à Natal sans s'arrêter à Galinhos. Étape probablement très belle mais j'ai besoin de naviguer quelques jours dans des conditions favorables, il me manque encore le plaisir de la magie d'être en mer. Natal, encore un atterrissage de nuit mais le chenal est bien balisé. Balade sur une plage de sable noir découverte par la marée. Au ras du sol le vent chargé de sable blanc dessine des chemins impalpables. Le prix du droit d'accès à la marina nous motivera à lever l'ancre après quatre jours. Cette fois nous passerons devant Fortaleza sans faire halte à cause des nombreux signalements de piraterie. Enfin cinq jours de mer dans de bonnes conditions, quelques coups de vents sous les grains mais le vent et le courant sont avec nous. L'arrivée est à la hauteur de la navigation. Une dernière nuit en mer et au petit matin nous abordons l'entrée du chenal. La terre n'est pas encore visible, les hauts fonds s'étendant jusqu'à cinquante kilomètre des côtes. Encore un grain, la visibilité se réduit à presque rien, il y a des filets et des bateaux de pêche, la tentions monte un peu. Une heure passe et déjà le soleil brille à nouveau. Nous atterrissons sur l'île de Lençóis. Carte postale, dunes de sable blanc, ibis rouge, hérons blancs, village de pêcheurs, maisons en bois posées sur la plage, quelques enfants à vélo, un âne avec sa charrette. Je continue ? Pas de voitures, l'eau potable au puits un peu à l'extérieur du village, l'électricité fourni par des éoliennes, la "ville" a trois heures de bateau, pas de magasin, pas de lumière de noël. Un excellent abri pour les fêtes de fin d'année. Nous pratiquons notre activité favorite, marcher. En vint jours nous ne nous lacerons pas des paysages de forêts, mer et dunes entremêlées. Le vent déplace les dunes, elles recouvrent la mangrove. Les

palétuviers d'une dizaine de mètres de haut apparaissent et disparaissent au grès des ondulations des dunes. Le point de confrontation nous invite à la contemplation. Un mur de sable blanc plongeant dans une exubérante forêt inondée. Un marin nous parle d'une autre rivière accessible, juste avant le delta de l'Amazone, à deux jours de navigation d'ici. Ce n'est pas encore cette fois que nous partirons vers Cayenne. Quatre jours, le temps de laisser passer un coup de vent et nous partons pour Vista Alegre do Pará.

Le tuyaux est bon et l'arrivée d'un voilier dans ce village est un sujet de curiosité. Le mouillage est sûr, d'ici nous pouvons aller passer quelques jours à Belém et sur l'île de Algodoal. Belém do Pará sur le fleuve Amazone (ou presque). Port de d'échange, de rencontre, de pêche, il y a ici un peu d'Istanbul, de Marseille, de Lisbonne, un peu de l'essence des ports. Le marché aux poissons est féerique, il participera sans aucun doute à donner cette saveur et cette texture hors du commun aux poissons de nos repas. Bref passage au bateau voir si tout va bien et nous partons pour Algodoal, une île à quelques encablures du continent. Les baba-cools se sont installés dans le village de pêcheurs il y a quarante ans et cela s'est bien passé. Depuis d'autres générations de personnes décalé sont venus. Au grès des modes, aujourd'hui écolo-responsable, toujours sympa et accueillant, avec un parfum d'herbe entêtant. Le budget hôtel a déjà été utilisé à Belém nous ne resterons que deux jours. Personnellement je me sens mieux dans notre bourgade de Vista Alegre. Je n'ai rien à critiquer de cette façon de vivre mais j'ai plus de facilité avec des préoccupations simples. A l'occasion d'une recherche François a trouvé un guide de navigation des trois Guyanes. Cela n'est pas encore à cette étape que nous arriverons à Cayenne. Nous levons l'ancre pour 450 miles jusqu'au fleuve Oyapock qui fait la frontière entre la France et le Brésil. Nous traversons l'embouchure de l'Amazone et à l'occasion repassons dans l'hémisphère nord. Nous naviguons dans de l'eau douce couleur de thé sur une distance équivalente à celle

de Marseille à la Sardaigne, le temps de traverser le fleuve. Puis nous retrouvons le courant des alizés jusqu'à l'Oyapock. Selon le guide l'entrée est inenvisageable de nuit mais nous arrivons à 22h et il n'y a aucune possibilité de se mettre en panne. Un peu de courage, un peu d'inconscience et beaucoup de concentration et nous remontons, dans une nuit d'encre, les 20 miles de l'estuaire jusqu'à être correctement protégé de la houle. Puis nous dormons. Au réveil le soleil brille sur un nouveau paysage. Les activités de la journée seront, deux heures de navigation en remontant le fleuve, la contemplation et le repos. À la marée du lendemain nous remontons jusqu'à Saint Georges à 80 km dans les terres. Un hameau sur la rive brésilienne, un autre sur la rive française, des pêcheurs et surtout l'immense et fascinante forêt vierge. Il y a une semaine que nous sommes à bord mais en arrivant en ville nous ne débarquons pas. Espérant garder quelques heures l'ivresse de cette journée sur le fleuve serpentant dans la foret équatoriale. Saint Georges est en France, la mairie, la signalisation, le mobilier urbain, il n'y a aucun doute. Notre premier plaisir sera une baguette tradition et un pain au chocolat. Deux heures suffisent pour faire le tour de la ville à pied, un petit centre administratif où les rencontres sont faciles.

Après avoir observer les bateaux de pêche et discuté avec les piroguiers nous décidons de remonter le fleuve jusqu'à Oyapoque, la ville côté brésilien. Notre passion pour le Brésil ne faiblit pas. L'activité sur le port, le terrain de foot, le poisson et l'açaï. Cette frontière est sympathique, des deux côtés l'intelligence et la souplesse prime sur la loi. Le fleuve reste le lieu d'échange, les uns et les autres vivant, travaillant, étudiant sur une rive ou sur l'autre.Il nous faudra deux jours pour redescendre le fleuve les marées ne nous étant pas très favorables.

A l'entrée de l'estuaire nous avons pris à gauche, une petite rivière pour remonter jusqu'au village de Ouanary. Ancien village d'esclaves ayant réussi à s’échapper, blotti au pied d'une colline et cerclé de marécages. L'état y a bien mis une mairie et une poste mais la première n'a jamais été inauguré et il n'y avait pas de timbres dans la seconde. De la colline la foret n'est plus un mur qui enserre le fleuve mais une immense étendu ondulante de vert et de brume.Nous quittons Ouanary en milieu d'après midi pour arriver de jour dans le chenal d’accès du port de Cayenne. Le vent est fort, le courant aussi, nous atterrissons à trois heure du matin.

Vendredi 15 février après quatre mois nous arrivons à Cayenne, Le voyage s'est installé.

L'équipage
20 mars 2019
20 mars 2019

:pouce:
Obrigado!

20 mars 2019

On a aimé Itaparica , tu as du connaitre Daniel et Ju sur leur cata sur place ...

22 mars 2019

Bien sûr, ils ont une petite fille charmante et pense partir vers le sud cette année

22 mars 2019

De nada. Navigar é precisa. Viver não é preciso

21 mars 2019

très beau récit merci :litjournal: :pouce:

21 mars 2019

La sécurité a Itaparica quand on y était n était pas top du tout ...

21 mars 2019

Hello,
On a eu le bateau(en 2015) visité pendant la nuit par 3 lascars, ils ont pris tout ce qui traînait dans l'entrée du carré(ordi, télephone, cb, quelques sous...)et on coupé une écoute de génois jaune(la couleur leur a plu...), tout ça en silence, le chien n'a rien entendu(ou voulu entendre...).
Le lendemain, ils ont attaqué un couple de Suisses sur la dite plage, le Tshirt sur la tête et les machettes en main, leur ont tout piqué...la nana ne s'en est jamais vraiment remise, et a arrêté le voyage quelques temps plus tard...
Le surlendemain, un samedi vers midi, ils ont profité d'une courte absence d'un Suédois pour pénétrer dans son bateau, pris sur le fait par le copain-voisin, ils ont tout balancé à l'eau avant de regagner la rive à la nage, accompagné par le copain en question sur son annexe...
Du coup ils ont été chopé, et ont passé 1 semaine en taule avant d'être relâchés...
Un peu excédé par la tournure des évènements, j'ai donc demandé qu'on m'écrive les noms des 3 lascars, ce que le flic s'est empressé de faire, en me remerciant même de prendre les choses en main(...)...puis j'ai tout transmis à qui de droit, et le problème a été vite résolu en interne, d'après ce que j'ai compris!
La bas, les locaux veulent garder leur tranquillité...
:tesur:

21 mars 2019

J ai comme l idee que la limite safe/pas safe est/etait le banc de sable: en deca du banc de sable pas de problemes, au dela du banc de sable les gens sont venus nous dire "surtout pas ici"; un jour on a fait un barbec sur la petite plage derriere le banc de sable et idem ils sont venus expres nous dire partez absolument avant le coucher du soleil.
Pour donner une idee a ceux qui ne connaissent pas, il doit y avoir 200m de distance entre les deux endroits.
Comme Fortaleza, a l interieur de la zone de l hotel pratiquement aucun probleme, si on mouille juste en dehors c est le braquage presque assure.

23 mars 2019

C'est effectivement un énorme problème à Itaparica.
L'insécurité dépend de quelques individus et donc et très variable d'une année sur l'autre. Il y a au moins deux ans qu'il n'y a eu aucun incident en revanche le Rio paraguaçu qui était un lieu tranquille est maintenant impraticable à cause de la piraterie.

22 mars 2019

Merci à vous. Les joies et les difficultés de la mer.

22 mars 2019

Hello,
Pour Itaparica ça a bien changé,j'y avais passé de longues semaines et on laissait le bateau ouvert sans soucis...
C'était il y a longtemps...mais on pouvait se faire braquer la nuit entre la marina et l'ascenseur à Salvador...
Sur Fortaleza il fallait obligatoirement se mettre au port de l'hôtel effectivement ; se mettre au mouillage sous les favelas c'est un peu provocateur, d'autant que les tarifs du port sont largement adaptables si l'on parle un peu portugais et que l'on est communicatif,seuls les américains payaient plein pot...

22 mars 2019

Bonjour, je cherche des photos d'itaparica avant 2004. Si par hasard vous avez cela.
Merci

23 mars 2019

Nous avons seulement une page faceb mais s'est plutôt un journal de voyage, en plus en portugais pour une bonne part des articles.
Par contre je peux vous envoyer deux guides de navigation qui couvre assez précisément cette region, en anglais et en portugais mais facile à comprendre.
Il y a vraiment des beaux coins même si souvent les distances sont grandes.
Si vous avez des questions précises sur certains lieux n'hesitez pas.
Par exemple j'ai les points d'entrée de Barra de São Miguel, un superbe endroit.
Bonne navigation
François

Phare de Port-Navalo

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