les regles de l'art respectés

le telegramme
À Brest, on immerge des troncs de chêne pour la restauration du trois-mâts Le Français
Par Stéphane Jézéquel

Le 21 février 2025 à 16h38
Afin d’assainir le bois de construction des navires, un bassin de la Penfeld, à Brest, accueille de nouvelles grumes de chêne pour une restauration exceptionnelle programmée en 2029 ou 2030.

Une vieille technique, héritée de la Marine royale, est remise au goût du jour, à Brest. Un bassin de trempage, en amont de la zone militaire de la Penfeld, permet d’immerger des troncs d’arbres avant qu’ils ne soient débités et séchés pour la construction navale.

Les grumes de 8 à 12 m vont rester au fond de la Penfeld pendant au moins deux ans. La plupart des troncs sont rectilignes pour le bordé. Pour la quille, un morceau spécifique a été identifié.

Éviter les parasites et les champignons
L’action de l’eau saumâtre (douce et salée) est bénéfique pour les bois de bateaux. « Ce séjour prolongé dans l’eau diminue le risque de prolifération de parasites et de champignons », confirme Yann Mauffret, le patron du chantier du Guip, à Brest.

Dans cette fosse de trempage de la Penfeld, les troncs bruts profitent d’un traitement naturel pendant au moins deux années d’immersion. Le bois fraîchement coupé a besoin de perdre sa sève et d’être débarrassé de ses matières organiques, tous ces éléments dont raffolent les grignoteurs de bois. L’Hermione, concernée par un redoutable champignon, n’a pas disposé de ce traitement préventif des bois pour sa construction. Le séjour prolongé dans l’eau permet de desséver les grumes en éliminant les tanins corrosifs et en prolongeant la durée de vie des bois de construction. Après deux ans dans l’eau, le bois est immédiatement coupé avant d’être mis à l’abri et séché encore deux à trois années.

Troncs séculaires
« Après ce procédé, le bois s’avère plus robuste et largement moins sensible à la pourriture. Nous l’observons régulièrement à travers les bois qui transitent dans les rivières, depuis leur lieu de coupe jusqu’à leur site de chargement », poursuit Yann Mauffret. Après un séjour dans l’eau, il se fend également moins lorsqu’il sèche. Un atout supplémentaire pour ces troncs séculaires et coûteux (entre 15 000 et 20 000 euros le tronc de chêne de 10 à 12 m), patiemment sélectionnés en amont, dans les plus belles forêts françaises.

À eux quatre, ils cumulent une sacrée expérience des bois nobles et de la charpente navale. Mickaël Renaud (Scierie des géants et le Bois idéal), Yann Mauffret, du chantier du Guip, Thierry Juliot, le pape incontesté du bois de marine, et Bruno Potin, spécialiste brestois de la marine à la voile, n’étaient pas mécontents de se retrouver sur cette opération d’enclavement sur la Penfeld.

La technique était bien évidemment utilisée au temps de la grande marine à voile, où l’on enclavait les troncs par centaines dans différents bassins du port brestois. Le procédé s’est maintenu à bien plus petite échelle, jusqu’en 2005. L’opération est reconduite en 2025, avec dix billes de chêne sélectionnées dans une grande forêt de Mayenne. Une fois ressorties de l’eau, les billes repartiront en Mayenne pour être coupées puis reviendront sur le lieu de restauration.

Le propriétaire du trois-mâts Le Français, Frédéric Lescure, a attentivement suivi les opérations d’enclavement des billes qui serviront à la restauration du navire du patrimoine.

Cinq millions de travaux
« Le trois-mâts Le Français fêtera ses 80 ans en 2028. Autant le restaurer le mieux possible et dans le respect des traditions de construction », résume le propriétaire morbihannais, Frédéric Lescure, qui vise une enveloppe de cinq millions d’euros de travaux.

« Immerger des troncs, ce n’est pas le procédé le plus simple, mais c’est un gage d’efficacité dans le temps », ajoute le patron breton, qui envisage de donner un maximum de visibilité à la restauration imaginée à Brest, dans la future zone de réparation du cinquième bassin. Il faudra compléter, au fil du temps, l’arrivage des grumes. Le chantier du Guip immerge trois billes supplémentaires.

« S’il fallait refaire l’ensemble du bateau, il faudrait entre 300 et 400 grumes au total, mais on n’en est heureusement pas là », rassure Frédéric Lescure, qui table sur 35 troncs pour réaliser la restauration programmée.

« Il s’agit d’un vrai enjeu de maintien des traditions de construction, alors autant bien faire les choses », ajoute le capitaine d’industrie, qui a commencé à sonner le branle-bas. À l’aide d’un judicieux partenariat avec le musée de la Marine, à Paris, il mobilise actuellement les forces vives et espère boucler les cinq millions d’euros de travaux avant 2029 ou 2030. Et, qui sait, repartir deux à cinq ans plus tard, avec un navire capable de retraverser l’Atlantique.

L'équipage
9h

Dans les vasières je crois que c'est encore mieux...
On a retrouvé des bateaux intacts ou presque après des centaines d'années dans la vase.
Et les anciens si je ne dis pas de bêtises les y laissaient tremper au moins 10 ans


awa (ex PiR2Lune):Aa lorient, le parc à bois etait effectivement planté dans la vase de la rivière (?)Quand j'étais gamin on voyait coté Lanester en passant sur le pont Saint Christophe comme des troncs sortir de la vase selon la marée... à moins que ce ne soit les vestiges d'un ancien pont en bois !·le 22 fév. 15:08
Calypso2:non c'est bien des pieux pour mettre le bois de construction des bateaux ,on les voie toujours ·le 22 fév. 17:39
nigrisnivert:Ce serait la raison pour laquelle ce quartier de Lorient s'appelle la Ville en bois. ·le 22 fév. 18:33
Calypso2:exact ·le 22 fév. 18:34

Le pb avec l’enclavation, c’est le temps.
Une fois sorti de l’eau après quelques années, le bois peut être utilisé, mais il faut encore laisser sécher les assemblages à l’abri une fois qu’ils sont réalisés avant de poursuivre le travail, donc couvrir le chantier. Tous ça est bien long pour un bateau qui est en attente de réparation.


Si c est une technique ancienne issue d une époque où on utilisait réellement ces bateaux elle sera sûrement plus efficiente que celle qui a été utilisée pour l Hermione et dont on voit le piètre résultat


Lulu2:Ce que je veux dire, c’est que rares sont les chantiers qui se financent des tonnes de bois pour l’utiliser potentiellement plusieurs années après.
Les bateaux comme Le Français sont peu nombreux et je vois mal un chantier investir dans du bois en vue d’une futur chantier de réparation de ce type qui se fera ou pas selon les aléas de financement ou qui se fera peut-être ailleurs.·le 22 fév. 15:53

On mettait si possible les chantiers orientés au Sud pour égaliser le séchage des membrures (navire en "bois tors").

Les bateaux attendaient parfois longtemps les financements en fonction de la politique extérieure.

Cela dit, il y avait aussi des vaisseaux et des frégates mal construits, avec du bois pas sec, et pas symétriques ("vaisseaux bordiers").

Ce qui étonnerait aujourd'hui, c'est le peu ce plans nécessaires, chaque corporation, charpentiers, bordeurs, perceurs, faiseurs d'espars, gréeurs travaillant avec "les règles de l'art", à une vitesse remarquable.

Genre un mois entre lancement et appareillage...

Réplique vaisseau de 74 "Le Jean-Bart"


La Recouvrance avait eu la chance de pouvoir être construite en 1991-92 avec des bois qui avaient passé plusieurs siècles dans la Penfeld; et je crois me souvenir découverts de manière fortuite.


la construction de l'Hermione a durée 15 ans il me semble , donc c'était bien possible de respecter un temps soit peu le savoir faire ,mais non des petits "malins" sont passé outre ..on a aujourd'hui le resultat ..


Lulu2:Un des problèmes de l’Hermione, c’est justement la durée du chantier. Certaines parties du bateaux étaient déjà largement sèches et donc déformées avant d’être assemblées avec du bois frais. Il fallait programmer intelligemment le neuf et le vieux pour éviter les déformations d’ensemble..
C’est pour cela que plutôt que faire le bordage à la suite, il a été d’abord fait à claire voie une virure sur deux, puis fermé par le complément à la fin du chantier, ce de façon symétrique. Il n’y avait pas que des branquignols, même si…·le 22 fév. 18:00
Calypso2:Lulu c'est ce qui a été fait , un bordé sur deux mi en place suivant les conseils de Raymond Labbé (paix a son âme) ·le 22 fév. 18:36
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