Réflecteurs radar


ne croyez pas que cela vous rend plus visible... en général

reflecteurs radarLes réflecteurs radar : mythe ou réalité ?

L’utilité pour les plaisanciers d’utiliser des réflecteurs est devenue évidente dès l’apparition des premiers radars à bord des navires de guerre et de commerce. Cette nécessité provient du fait que beaucoup de yachts étaient construits de bois et l’apparition des matières plastiques n’a rien arrangé. Tout le monde connaît le principe de base des réflecteurs radar, à savoir présenter aux ondes émises par un radar la surface la plus grande et la plus réfléchissante possible. Ce résultat peut être obtenu par deux méthodes distinctes :

- Un réflecteur passif, sorte de montage tétraédrique de plaques de matériau réfléchissant, souvent de l’aluminium. Celui-ci garantit le plus grand retour possible des ondes qui le touchent.
La « pilule » contient en fait aussi un simple montage de plaques, protégées pour éviter le raguage des voiles.

- Un réflecteur actif qui, chaque fois qu’il détecte un signal radar, émet un signal amplifié sur la même fréquence que les ondes qui l’atteignent.


Quel est le meilleur réflecteur ?

A priori, on peut admettre qu’un réflecteur actif est plus efficace qu’un passif, mais comme pour beaucoup de choses, cela a un prix. En l’espèce, l’efficacité est proportionnelle à la consommation électrique, point toujours sensible à bord d’un voilier de long cours. Ajoutons à cela le prix très élevé de ces appareils et il est clair que l’option normale est le réflecteur passif.

L’inconvénient principal du réflecteur passif est la possibilité qu’il supprime l’ensemble de l’écho du yacht. Cela peut se produire de manière très simple : le yacht est un ensemble de réflecteurs dont les plus importants sont les accessoires métalliques sur le pont, le mat en alliage, l’éventuel moteur suspendu au balcon, et bien entendu le réflecteur passif.


Considérons seulement deux réflecteurs, par exemple la bôme et le réflecteur passif. Les ondes renvoyées par ces deux réflecteurs arriveront au radar avec une légère différence due au fait que la distance n’est pas identique à quelques mètres, voire quelques centimètres près. Comme la longueur d’onde des radars commerciaux est de 3 ou 10 cm, cette petite différence peut faire arriver les deux retours en phase, auquel cas ils s’additionnent, ou en phase alternée à 180°, auquel cas ils se soustraient, et votre réflecteur a rendu votre yacht invisible. Cette possibilité est moins probable avec un réflecteur actif car son signal est beaucoup plus fort que les retours naturels du bateau.


Dans la pratique, vu le grand nombre de points réfléchissants à bord et les mouvements du bateau, celui-ci restera visible pour un grand pourcentage de pulses, toutefois le retour sera d’intensité irrégulière. A priori pas de problème, mais nous allons voir que cela est en fait d’une importance vitale.

De nombreux tests ont été effectués et publiés afin de déterminer le meilleur réflecteur passif. Selon les sources, et soyons francs selon la manière dont certains tests ont été configurés par des fabricants tant de réflecteurs que de radars, différents modèles sortent meilleurs du lot.

Paradoxalement, les mesure très techniques en laboratoire sont souvent moins fiables que des tests effectués sur le terrain par les équipes de certaines revues nautiques, car elles tendent à négliger la réalité des conditions d’utilisation du radar et du réflecteur (mouvements du yacht, vagues parfois plus hautes que la coque ou l’ensemble de la cible etc…). La question que le plaisancier prudent doit se poser est en fait de savoir si le vrai problème auquel il est confronté est l’efficacité de son réflecteur. Un réflecteur n’est jamais qu’aussi bon que l’opérateur du radar qui le détecte.

Un yacht est il visible pour un navire de mer ?

Une expérience toute simple permet de se faire une idée de l’attention qu’un officier de navire de commerce peut donner à son radar : Tournez votre téléviseur de façon à ne le voir que lorsque vous êtes exactement devant et tout près. Allumez le au moment du journal et essayez de suivre les nouvelles tout en comptant le nombre de voitures qui passent sous vos fenêtres. Pour peu que l’officier aie des corrections de cartes à effectuer en même temps, essayez de préparer une omelette tout en suivant les nouvelles et comptant les voitures.

Supposons naïvement que tous les navires soient conduits par des officiers modèles qui appliquent à la lettre le règlement et en particulier les règles 5 et 7 du RIPAM, il n’en demeure pas moins qu’à part sur certain navires de guerre, peu de radars sont observés continuellement. L’opérateur va passer régulièrement devant son écran et accorder plus ou moins d’attention à celui-ci en fonction du trafic et des conditions de visibilité.

Par temps clair et mer calme, votre réflecteur donnera un écho très stable et fort. Dans ces conditions, l’officier de quart ne donnera que de brefs coups d’œil à son radar afin d’évaluer le risque de collision avec les échos les plus proches. En pleine mer en l’absence de trafic intense, il est même possible que le radar ne fonctionne pas.

Si la visibilité se dégrade à cause de pluie, l’opérateur va essayer de filtrer les parasites au moyen d’un « anti-clutter rain ». Ce sont des filtres qui ne permettent que l’affichage des échos forts et constants. Même par bonne visibilité, si la mer se soulève, un autre filtre va permettre d’effacer les vagues dans un rayon réduit autour du navire, c’est un « anti-clutter sea ». Dans ces deux cas, nous avons vu que les mouvements de notre yacht et la petitesse de l’écho rendent son intensité très variable. La conséquence directe est que notre bateau sera classé comme vague par le filtre, et effacé deux balayages sur trois.

Si notre écho est généralement si faible qu’il ne deviendrait visible qu’à environ 2 miles du radar, et que l’officier qui fait la veille sur 12 miles a filtré une zone de vagues parasites de 4 miles, le yacht est invisible. Rappelons nous aussi que nos feux ne sont visibles qu’à quelques miles, parfois moins par temps de pluie.

Une expérience pratique de plusieurs années sur divers navires équipés de radars plus ou moins bons, mais tous réglementaires, prouve hélas cette théorie. En fait à plusieurs reprises, des voilier qui avaient été observés visuellement n’ont pu être détectés au radar malgré tous les efforts pour adapter le réglage de l’appareil. D’autres ont été détectés, mais seulement après un choix de réglage des portées et des filtres qui ne serait normalement pas utilisé dans les mêmes conditions. Chaque fois qu’il a été possible de contacter le plaisancier, celui-ci a confirmé la présence d’un réflecteur dans son gréement.


En bref, il y a de nombreuses circonstances dans lesquelles un yacht est effectivement invisible au radar pour un navire de mer. Heureusement le brouillard n’est pas une d’elles. Par temps calme dans la brume, votre réflecteur est effectivement votre meilleur allié. Cela est d’autant plus heureux que, si on se considère toujours invisible, on tentera systématiquement de donner de l’eau aux poids lourds, et c’est impossible dans le brouillard a moins d’utiliser soi-même un radar.

Conclusions :

- Il n’y a pas forcément de meilleur réflecteur. Cela dépend du bateau. On a vu que le réflecteur doit à lui seul être plus visible que l’ensemble du reste du bateau pour garantir la stabilité de l’écho. Un simple tétraèdre en aluminium peut être suffisant sur un petit bateau tout en plastique ou en bois. Sur un plus grand yacht avec une imposante mature métallique et éventuellement une coque en métal, un petit réflecteur passif n’est que marginalement utile car il augmente un peu la surface visible. L’investissement dans un réflecteur actif doit être considéré si on veut améliorer significativement sa visibilité.

- Même avec un très bon réflecteur, la possibilité de retours multiples peut rendre votre écho instable.

Le plaisancier prudent fera bien de considérer dans tous les cas qu’il n’a pas été aperçu, et manœuvrera en conséquence. Un solitaire ne dormira que de jour par bonne visibilité s’il le peut.