Les consoles de barre et de cockpit du quetzal.


Comment faire des petites pièces en sandwich stratifié, pour vos instruments par exemple.

Principe

Pour faire les consoles d’instruments du Quetzal , j’ai utilisé du sandwich polyester sur une âme en PVC allégé (Komacel), le résultat est facilement très correct, robuste et fonctionnel, mais une esthétique parfaite dépends du soin et du temps passé..

La description qui suit peut s'appliquer avec des variantes à toute pièces en sandwich, en adaptant a la fonction: On utilisera plutôt par exemple une âme en CTBX et une stratification en mat épais pour des varangues ou carlingues. Mais la technique du travail du stratifié reste la même.


Le cockpit du Quetzal

Les instruments de cockpit étaient initialement placés encastrés dans les hiloires avant , et le pilote accroché derrière le barreur. Les cadrans étaient exposés aux coups de manivelle et masqués par les glènes de drisses, le sondeur était invisible du barreur, et l'appui sur les touches du pilote demandait au barreur une gymnastique douloureuse, physique et intellectuelle (car babord et tribord étaient inversés!) De toute façon la pose de deux hublots de cabine dans les hiloires demandait de les déplacer.
 
Après réflexions, je prévois donc d’une part une console de barre  portant le pilote, le compas, le sondeur et le GPS,( tout ce que le barreur peut souhaiter sous ses doigts ) et des consoles plus petites sous la capote, pour les cadrans de vent et de loch.

Ces consoles sont largement dimensionnées, pour permettre d’ajouter facilement un instrument ou un switch plus tard

Les essais

les consoles de barre et de cockpit du quetzal Dés que les pièces non stratifiées commencent a prendre forme, il faut faire des essais de positions, voir l’ergonomie des commandes, la visibilité. Quand la pièce est finie stratifiée et peinte, les modifications sont beaucoup plus difficiles.

Je pensais initialement mettre les instruments au dessus de la descente comme on voit partout, mais un essai a montré que ce n’était pas viable : le passage devenait réduit, donc nombreuses bosses très probables, la console est donc coupée en deux et prendra place de part et d’autre (photo)

Pour la console de barre, qui s’accroche aux barres existantes et a la colonne, je croyais avoir pensé à tout sur plan, en particulier à l’ouverture des coffres de cockpit, qui passent à 5cm de l’objet, mais l’essai a montré que la poulie de pilote auto ne passait plus ! donc modification, en rentrant les barres dans la pièce. De plus ce bloc en partie vide devient beaucoup plus utile si on y inclus des petits équipets (pour le shampoing, la casquette, le chocolat des quarts de nuit..)  :  la forme devient complexe, mais ce n’est pas vraiment un problème.




Les piéces simples

les consoles de barre et de cockpit du quetzal Les consoles sous capotes sont très simples : elles ne craignent pas les éléphants, à la rigueur un coup de manivelle, et ne seront pas en sandwich : stratification simple, bonne pièce pour se roder.

L'accés au cablage est prévu par dessous, avec une plaque de protection. La fixation se fait avec des étriers inox sur la jambe de capote et sur une main courante . La sortie des cables se fait a travers le pont, avec un petit passe coque en plastique rentrant dans la console.


La pièce complexe

La console de barre est nettement plus délicate. Elle peut avoir des chocs plus sérieux (la bôme, le HB qu’on sort d’un coffre..) et doit résister, de plus elle peut servir de support au moteur de pilote, ou a des mains courantes. Elle sera donc en sandwich , permettant le serrage de boulons et donnant une rigidité correcte.
 
La couche intérieure peut être faite par angles successifs, l'esthétique est secondaire, a condition d'éviter soigneusement les brins coupants dans les petits équipets. La stratification a l’intérieur d’un petit volume est vraiment délicate, L'accés se fait par les ouvertures prévues avec un pinceau à manche coupé.. Pour un premier contact avec la stratif polyester, simplifiez la forme, ou prévoyez un accès complet intérieur (fond amovible par exemple).


Le passage des cables se fait par la colonne, cette zône est totalement innaccessible dans le Sunfizz, l'accés a donc été amélioré par un petit hublot ouvrant dans le coffre tribord. Il permet d'inspecter ou de changer les drosses, de passer un cable de plus, et d'inspecter également le réservoir à gasoil (sonde, colliers..). Un tube pvc de 22mm passe dans le trou prévu pour l'éclairage compas. juste suffisant pour les cables de sonde pilote, gps à ajouter (c'est serré!) .





Le matériel

les consoles de barre et de cockpit du quetzal L’ âme du sandwich peut être en CTBX, mais j’ai utilisé le Komacel (PVC allégé, on en trouve à Casto ou Gaches chimie). Le Komacel est imputrescible, lèger, se colle à la colle pvc de plombier, se rabote, se ponce, ne nécessite pas de couche d’accrochage ni de ponçage pour être stratifié  … génial !, sauf qu’il n’a aucune dureté de surface, un coup de fourchette le raye, un coup de manivelle l’enfonce.

La dureté est obtenue par un tissus roving fin( du 160g facile à trouver ) et une résine qui colle tout ça. J’ai l’habitude du polyester , mais l’epoxy est aussi bon.
Petit avantage du polyester (outre le prix), on peu ajuster le temps de prise selon la température, alors que l’epoxy  prends très vite au dessus de 25°. De plus l’epoxy me rends malade, alors que le polyester me met seulement dans les vaps… à vous de voir.
 
Prévoyez donc, prèts à l’emploi sur un plan net et propre :
 

  • Du tissus
  • De la résine préaccélérée,
  • son catalyseur (une seringue est pratique pour doser),
  • un mélangeur (fil de fer tordu)
  • des pots de plastique jetables (bouteilles coupées)
  • des pinceaux
  • des ciseaux et cutters
  • de l‘acétone
  • chiffons divers
  • gants jetables ( cependant la peau se nettoie bien du polyester, et les gants sont trés inconfortables.. )
 
N’oubliez pas que tout ce qui a touché la résine ou le gel coat, demande un nettoyage soigneux à l’acétone, et éventuellement doit être jeté ! (vêtements,  pots, ciseaux, pinceaux…)
 

La méthode

les consoles de barre et de cockpit du quetzal La Préparation des piéces
 
  • Les pièces doivent être impeccables et propres (le Komacel se nettoie au liquide vaisselle)
  • Les angles extérieurs arrondis et doux. (rayon 1cm ok, d’ou l’usage d’une âme de 10mm),
  • les angles rentrants reçoivent un joint congé en mastic polyester , ainsi que toute fentes de collage, trous etc..
Il faut savoir (vous le saurez très vite !) que toute grain ou défaut de surface se traduit par une bosse ou une bulle quasi irrécupérable.
 
Coupe des tissus
 
La coupe du tissus doit être bien choisie pour obtenir le meilleur aspect : une pièce simple peut être faite d’un seul coup , en coupant le tissus en excès après imprégnation. Une pièce complexe demande de couper les lés soigneusement, en cachant les raccords toujours visibles dans les zones non gênantes. (dessous, derrière les cadrans..)
 
La console de barre sera faite en trois étapes :

A)Les renforts intérieurs
B)Les quatre faces accessibles sans retourner
C)Le reste après retournement

Il faut une journée avant de manipuler et poncer chaque passe, donc prendre son temps.. Le tissus se coupe avec des ciseaux de qualité (hélas aprés quelques coupes le verre émousse l'acier!), ou un cutter a lame neuve
 
La phase critique
 
Préparer juste assez pour votre étape en cours, car la résine ne vit pas vieux en pot. La quantité varie de 300g/m2 pour notre cas (roving 160g) à 1kg au m2 pour du mat 400g.
 
Quand la résine est mélangée au catalyseur, plus aucune hésitation n’est possible… Elle reste fluide (un peu comme le miel) 1/2h à 1h avant de s’ « empâter », elle est alors inutilisable.

Le dosage est a ajuster selon température, volume préparé, et habitude : Personnellement, en petites quantités je mets 1% à 28° et 3% à 18° .
Ce sont des limites de température raisonnables : à 30° on ne maîtrise plus rien, et à 15° elle n’est parfois dure que le lendemain.
Si la résine prends trop vite, en supposant que vous avez eu le temps d’appliquer, elle chauffe, prends en bloc en se fendillant et éventuellement déforme l’âme en PVC.
Si elle prends trop lentement, vous risquez un coulage lent qui va désimprègner votre tissus, décoller les pièces si le poids ne les tiens pas.( Les pièces « a l’envers », sont à éviter mais faisables si on surveille en réappliquant en permanence pendant le durcissement.)
 
Une aide est utile pour manipuler le tissus avec des mains propres, et pour couper ou éliminer les fibres balladeuses. En effet, avec vos mains poisseuses, tout ce que vous touchez s’accroche et la catastrophe est vite proche..
 
Il est impossible de détailler chaque geste, qui se rodent à l’usage , après une pièce d’essai, pas trop esthétique (exemple : le support d’alternateur dans la cale !!).
Je ne donne ici que le principe :
 
  • Enduire la surface d’une couche de résine
  • Appliquer le tissus avec les mains puis au pinceau (le rouleau pour des petites pièces complexes est inutile voire gênant ), c’est l’opération la plus délicate dont dépends l’aspect final : vous verrez à l’usage que le roving a une capacité de déformation étonnante, mais limitée ! on peut l’appliquer sur une boule, après imprégnation, mais pas sur un coin triple !
  • Laisser imprégner, écraser les bulles, bien appliquer les coins
  • Ajouter de la résine sur les manques
  • Surveiller les bulles, les décollements
  • Eliminer tous les fils « décommis » du tissus, très difficiles a éliminer plus tard.
 
Quand la résine commence à durcir, allez nettoyer tout, vous ne pouvez plus rien faire ! toute tentative de rattrapage avec le pinceau collant ou les ciseaux bloqués empire le défaut !
(Ah oui, j’oubliais dans le matériel nécessaire : une grande poubelle !)..
 
Photo : la console de barre après stratif intérieure et première passe extérieure. Les zones de limites de tissus sont placées au mieux pour être invisibles après montage
La résine est en général colorée rougeâtre ou verdâtre, pour bien voir les manques : le tissus non imprégné est brillant, il est mat et translucide après imprégnation. Les bulles se voient alors très bien (en général dans les angles, les coins, ou sous le tissus mal appliqué.)




Finition

les consoles de barre et de cockpit du quetzal
Entre chaque passe

Tous les brins saillants doivent être éliminés : a la scie à métaux  on élimine les excès de tissus, puis une lime moyenne pour ajuster les angles avant de passer la couche suivante .

Quand toute la pièce est stratifiée,

Aprés ponçage au papier gros puis moyen, la meilleure finition est le gelcoat de surface (paraffiné) , suivi éventuellement d’un ponçage moyen pour éliminer certains brins de verre en excès, quelques raccords en deuxième couche suffisent en général pour parfaire.
Le gelcoat de surface est plus strict encore que la résine sur les conditions météo: en effet pour durcir et devenir mat comme il doit être, il faut que la parafine migre en surface, permettant le séchage du gelcoat a l'abri de l'air (le gelcoat a l'air reste toujours poisseux). S'il prends trop vite, au desssus de 25°, la parafine n'a pas le temps de migrer et votre surface restera poisseuse, et impossible a poncer. On peut rattraper la catastrophe avec une deuxieme couche, mais ce ne sera jamais aussi homogène qu'une seule couche épaisse bien durcie.

Les joies de la stratification

Outre le bon dosage et la course contre la montre quand la résine durcit, la stratification au polyester est source de multiples joies, surtout en plein air .

Si vous n’avez pas un local climatisé avec hygrométrie contrôlée, vous dépendez du temps : à l’ombre, par 20 à25°, avec une petite brise de terre c’est parfait. Le temps humide est a exclure car il empêche la résine de durcir (elle durcit mais reste poisseuse !). Le grand vent aussi car la poussière se colle irrémédiablement a la pièce, sans parler des gouttes qui quittent le pinceau et qui vont se coller ailleurs..(sur la voiture du copain par exemple).
 
La résine et le gelcoat non polymérisé (encore pire!) ont une tendance étonnante a passer d'un objet a l'autre ... ce qui fait que vous en retrouvez partout. La résine étant incolore, les taches se voient peu. Pour le gelcoat c'est plus facile car on le voit, mais vous en retrouvez quand même sur le siege de la voiture, ou sur le téléphone, ..
 
Ah, j'oubliais: les moucherons adorent l’odeur de résine et viennent s’y coller ! (c’est sans doute ainsi que le moustique de « jurassic  park» a été piégé !)

Enfin, bien sûr l’odeur de styrène, d’acétone , qui monte de toute cette cuisine vous met très vite dans un état second ,( pas très agréable , je préfère nettement le tipunch !) qui ralentit le cerveau et amène à des catastrophes : pinceau qui tombe dans le sable, double dose de catalyseur, pots renversés….

Conclusion

La console est bien belle, sur la barre, et les petits défauts, on ne les voit pas trop finalement…

Un conseil, toujours et encore : c’est très risqué de débuter par une pièce aussi complexe et esthétique. Donc commencez  par des pièces d’essai non esthétique, et faciles à refaire..