La foudre en mer


Oh la belle bleue… elle est tombée à 300 mètres du mât dis donc… Alors que nous approchions de l'équateur, et donc de l'ITCZ, zone intertropicale de convergence (ça impressionne toujours le profane), j'ai cru bon de réviser le chapitre foudre en mer. A vrai dire, je m'y étais intéressé avant, parce qu'on peut prendre le ciel sur la tête à peu près n'importe où. Je dois préciser que lors de notre voyage, les orages les plus impressionnants ont eu lieu au Nord de la Rochelle et au sud de Minorque - à la maison, quoi.


Le mât seul sur l'eau attire t-il la foudre ?

la foudre en mer Comme tout objet pointu sur une surface plane, le mât peut effectivement jouer un rôle attractif sur la foudre. Cette attraction ne se manifeste cependant que dans un cercle délimité, appelé par les professionnels " surface de capture ". La surface de capture d’un mât est un cercle dont le rayon vaut trois fois la hauteur du mât.
Par exemple, pour un mât de 10 mètres, le rayon critique est de 30 mètres. Si la foudre frappe dans ce cercle, il y a de fortes chances pour que ce soit effectivement sur le mât du bateau. Mais l’éclair peut très bien frapper l’eau à 50 mètres du bateau malgré la présence proche du mât.



Quels sont les risques de la foudre?

Il y a deux risques bien différents : danger pour les personnes si la foudre tombe sur le bateau, danger pour l'électronique si la foudre tombe tout simplement à portée d'oreille. C'est évidemment le danger le plus commun. Un éclair qui frappe, même à distance, a par induction des effets électromagnétiques dévastateurs sur l'électronique du bateau.

Comment protéger les personnes ?

Commencez par réduire les voiles en fonction du vent qui risque de souffler sous ce gros cumulonimbus fort peu sympathique. Si ça pète vraiment, autant se rentrer à l'intérieur et éviter de toucher les cadènes ou tout autre pièce métallique, ça va de soi.

Comment protéger le bateau ?

Si vous avez un bateau métallique, aucun souci. Ce sont les seuls à pouvoir se prendre un coup de foudre direct sans danger. Sur les bateaux en plastique, normalement, les gentils constructeurs ont prévus un circuit anti foudre. Il y a une norme là dessus, la norme ISO 10 134 pour être précis : le mât, les haubans et les pièces exposées doivent être reliées à la masse (la mer), la section de la tresse doit être d’au moins 8 millimètres carrés de cuivre ; cette tresse doit suivre le plus court chemin du mât à la mer, sans coude brusque. Il paraît que c'est vraiment un minimum qui sert plus de cache misère qu'autre chose. C'est pourquoi les manuels de type Glénans proposent aux futurs foudroyés de relier le mât du bateau à la masse avec la chaîne d'ancre. Il y a intérêt à bien s'assurer du contact entre le mât et la chaîne, et entre la chaîne et la mer, sinon, va y avoir de la soudure céleste à bord. C'est un coup, paraît-il, à se prendre le mât sur le râble, en effet si la connexion n'est pas bonne, l'étincelle entre le mât et la chaîne va fondre et sectionner l'espar. Mais à choisir, on aime encore mieux se prendre un mât que 100 000 ampères... Seulement... Ce genre de manip', c'est bien dans les livres, mais en pratique, permettez moi de me marrer. D'abord, il faut avoir le courage de manipuler une chaîne sous une pluie d'éclairs. Ensuite, faut être sérieusement motivé pour sortir les X mètres de chaîne, en mer, alors que celle-ci se déchaîne (puisque c'est l'orage, je vous le rappelle). Une fois tout ça fini, en général, l'orage aussi est fini.

Comment protéger l'électronique ?

En s'y prenant dès que l'orage est à 5 kilomètres du bateau. Le remède est simple : débranchez physiquement les instruments. On peut le faire rapidement en ouvrant le tableau électrique, si celui-ci est bien fait. Dans les zones côtières, on est parfois content d'avoir un GPS portable en rab' pour pouvoir continuer à suivre la nav' sans risque. Il est recommandé de déconnecter également l'alimentation en fermant les coupe batteries. Note : la plupart des électroniques grillées le sont sur des bateaux au port ou au mouillage. C'est qu'on oublie le danger lorsque l'on n'est plus à bord. Au passage, tant qu'on y est, évitez la connexion à la prise électrique du quai, durant un orage : le réseau électrique 230 volts peut véhiculer des courants de foudre terrestre d’origine plus ou moins lointaine.
Voilà voilà… on tachera de vous rapporter des photos des feux de Saint Elme (ce qui suppose qu'on garde le mât debout !)