Faire une jupe en polyester pour un sunfizz

La partie « coque » de la jupe du « Quetzal » existait déjà, fort bien faite par un chantier, mais elle manque de rangement , les échelons sont peu pratiques, pas de place pour le régulateur ou le mouillage.
Conclusion : au boulot !.
Ce qui suit traite donc de l’achèvement « intérieur » de la jupe et de ses accessoires, par la méthode du moule femelle stratifié.

Résumé

Sur les 12m modernes qui exposent leurs arrières généreux de 3m et plus au regard des promeneurs la  « jupe » est devenue une  véritable « plate-forme . On y voit des complications de forme plus proches du jacuzzi que d’un bateau. Sur les bateaux qui restent  beaucoup la jupe au ponton, on peut même y trouver des marches  en moquette à long poil individuellement éclairées ( vu a Antibes !) des douches a eau chaude thermostatées (si, si !) des lampadaires de jardin ( vu aussi !)..

Sur les bateaux de voyage, l’essentiel chasse vite le superflu : survie a poste, mouillage prêt, pare-battages, poubelles en stock, hors bord d’annexe, bouées a filin, lignes de traîne, aérogénérateur, caisse a palmes et tubas,...

Sur un bateau ancien comme le Sunfizz, la largeur de tableau n’est que de 2,20m, il faut donc rester raisonnable : difficile d’y loger un jetski ou une annexe complète non dégonflée !

La partie « coque » de la jupe du « Quetzal » existait déjà, fort bien faite par un chantier, mais elle manque de rangement , les échelons sont peu pratiques, pas de place pour le régulateur ou le mouillage.
Conclusion : au boulot !.

Pas question de casser l’existant, même si en partant a zéro, j’aurais fait une jupe plutôt de 80cm que de 60cm, mais bof. . Ce qui suit traite donc de l’achèvement « intérieur » de la jupe et de ses accessoires, par la méthode du moule femelle stratifié.

Pour réaliser la partie « coqueron » qui prolonge la coque, la méthode a été décrite ailleurs sur le site (voir notamment les contributions de Alex sur « horus »)

Comme dans les livres de cuisine, ce bricolage est a coter « assez difficile »
Temps nécessaire : compter un mois (une semaine pour un pro qui a tout le matériel)
Prix : environ 200E de matières et consommables (fabrication totale à la maison) ,  500E si  on sous-traite la stratif, 2000E si on fait tout faire au chantier.



Reflexions sur le projet

a quoi sert une jupe

La jupe sert d’abord à monter et descendre du quai ou de l’annexe, à aller a l’eau et en sortir, pour le bain par exemple ou en cas d’homme à la mer,  à se doucher, aux manoeuvres d’arrière.

Comme malgré le désir de liberté on est souvent au ponton, le confort est d’y brancher eau et electricité.

Le mouillage arrière donne une sécurité de manoeuvre au vent dans certains ports,( pas toujours facile de mouiller en culant avec vent de travers, pour arriver au quai !). Mais s‘il est au fond d’un coffre sous les sacs a voiles ! donc ancre, chaîne et bout seront à demeure à l’arrière sans manipulations épuisantes.

En y stockant  tout ce qui sert a ces diverses activités « arrières » , la vie est beaucoup plus simple : accessoires de quai (tuyau, ..)ou de bain (palmes ) ou de douche (shampoing)ou de mouillage (chaîne et bout)
Prévoir un davier en angle de jupe pour protéger des manoeuvres de mouillage, un taquet solide pour l’annexe.

Eventuellement elle peut aussi servir de support a des accessoires, comme les bossoirs d’annexe, l’antenne radar ou blu, le pavillon. Et sans parler du portique imposant que nécessite vos éoliennes et panneaux solaires

En plus de tout cela elle doit être belle ! car le nom calligraphié de votre bébé s’y étalera,

 tout cela en gardant en tête les contraintes diverses :
-légèreté (c’est du poids mal placé)
-facilité de construction (sans modifier les parties existantes, sans trop de moulages)
-robustesse (on doit sauter dessus, cogner le quai, sans que ça craque..)
-et bien sûr , pas trop chère (pas vous ?)

remarques sur les accessoires

monter et descendre facilement demande des marches d’au moins 20cm de profondeur et au plus de 35cm de haut . Dans notre cas, deux marches de 30cm sont ok.
l’échelle de bain doit avoir au moins trois échelons dans l’eau, et une largeur de 30cm environ pour y mettre deux pieds à la fois
Elle peut être centrée, mais elle gène alors pas mal l’accès au quai quand elle est relevée, et empêche de monter un régulateur d’allure.
Si elle est décalée, la fixation est plus haute et les appuis moins larges.
Dans les deux cas il faut des points d’appuis hauts pour monter : poignées , main courante.
Le largage doit être très facile en cas d’urgence, en particulier dans notre cas elle reposera sur la survie accrochée au balcon, et ne doit pas gêner sa manoeuvre.

Le régulateur d’allure : L’ ATOMS d’occasion, qui évitera de monter un pilote électrique a vérin de 1500E pour des traversées, est toujours au fond du garage depuis deux ans. J‘ai hâte de l’essayer, et prévois donc les fixations pour le monter et démonter facilement dans la nouvelle jupe (quatre boulons de 10mm), il serait souhaitable de le ranger facilement avec un démontage partiel, car il gène a l’escale.

La passerelle est lourde et encombrante. Sa longueur doit permettre de garder au moins 50cm de marge avec le quai. Comme on n’a jamais besoin simultanément de l’échelle et de la passerelle , une combinaison est à étudier (planche posée sur l’échelle relevée par exemple)

La survie dans un coffre de jupe ? on le voit sur les nouveaux plans, mais c’est discutable : le largage demande d’ouvrir, de tirer le container de 40kg, de le jeter ... Elle restera donc accrochée au balcon, avec support a bascule de largage (de toute façon il n’y a pas la place dans la petite jupette prévue !!)

Le raccord d’eau doit permettre la coupure du quai, avec un réducteur de pression, et ne pas amener les fuites éventuelles et probables dans les coffres de cockpit. Le stockage de la manche a eau est souhaitable également hors coffres de cockpit car elle se vide toujours mal.

Le raccord électrique peut  être dans la jupe (pb d’eau !) ou dans le cockpit. L’essentiel est d’éviter le cas actuel ou le fil est écrasé par le coffre et gène tout le monde.

La protection arrière des angles sera double : un profil en U plastique ou caoutchouc sur l’arête, et une défense de jupe amovible sur l’angle bas

Photo : les coffres en final (un mois aprés)  





Le projet

Deux ou trois avant projets pour remplir ce coqueron sont dessinés pour la comparaison.
 
Les schémas montrent les contraintes externes principales : emprise du volume de la survie, passage entre les balcons , place du hors bord, hauteur de l’eau, et emplacement possible des accessoires
 
Après réunion de famille, le projet de la photo est adopté : une banquette large faisant marche,  donnant accès a un coffre assez large pour loger ancre, pièces de régulateur et divers trucs (palmes, ..), et un plancher relevable sur une trappe pour stockage des tuyaux de quai.
 
Le projet sera réalisé en stratifié polyester, par la méthode du moule femelle (la plus propre) : La pièce est ensuite  rapportée sur le tableau et la jupe existante, avec collage en bord a bord le long de l’arête arrière . Ce collage sera couvert d’un couvre joint plastique ou caoutchouc dur, amortisseur de chocs .
 
Photo : plan en coupe

Le moule

 
Le moule ne sert en principe qu’une fois , il est donc en matériaux jetables et économiques : les parties planes servent de châssis et sont en agglo mélaminé récupéré dans des vieux meubles, les parties courbes en isorel lisse.
le premier assemblage permet de vérifier l’aspect et l’ergonomie,
Le tout est ensuite rigidifié par tout ce qu’on veut : chutes de cp, tasseaux.. afin que les zones minces soient rigides.
 
Quelques trucs : faire des schémas de détail du moule a partir du plan précis de jupe, car on a vite fait les erreurs classiques : on oublie l’épaisseur du bois , ou on la compte du mauvais bord ... il faut raisonner a l’envers, l’intérieur du moule devient l’extérieur esthétique de la pièce finie.

La finition consiste a amener toutes les arêtes internes (concaves et convexes) a un rayon de 10 à 20mm, et a lisser. Rabotage, ponçage puis mastic genre carrossier, et reponçage (le mastic est le plus cher dans le coût du moule). C’est la phase critique a soigner : tout défaut apparaîtra (rayon irrégulier, tête de vis..)
 
Photo : moule fini





stratification

 
Le gros du prix si on fait un devis chantier est dans le moule, l’ajustage, la finition. La stratif de 2m2 environ n’est pas trop chère (un  jour de boulot à 30E l’heure..) : j’ai donc décidé pour une fois de sous-traiter a un stratifieur! (on vieillit..)
Détail de réalisation :Une cire de démoulage est appliquée, avant le gelcoat de moulage. Attention, c’est un gelcoat qui ne sèche pas a l’air, contrairement au gelcoat de surface ou de retouche qui est parafiné pour sécher a l’air. Enfin, le plus facile est de passer les 2 ou 3 couches de mat 450, sans soucis esthétique. Prévoir renforts aux angles et sous les fixations prévues ( beaucoup plus facile a faire quand la piece est a terre qu’à l’aveugle accroché a l’échelle !)

Des contre-plaques en inox sont également noyées aux points trés sollicités : dans mon cas aux boulons de régulateur d’allure et d’échelle, mais si vous y fixez le portique ou les bossoirs, là il faut de gros renforts.
 
Photo : moule prèt à stratifier

Démouler

 
En principe quelques coups de maillet un peu partout doivent faire sonner creux le moule, et détacher la piece, si le plan est démoulable ! sinon, dévisser tous les morceaux de moule un à un, car vous aurez pris soin de laisser toutes les vis accessibles, bien sûr !

Pour vous assurez qu’une piece est démoulable, regardez l’intérieur du moule fini a quelques metres : vous devez trouver un angle ou on voit toutes les surfaces, c’est par la que ça sortira.

Dans mon cas , ce n’est pas le franc succès : les plaques en isorel se sont cassées au démoulage.. donc impossible de refiler le moule à un autre amateur..
 
Photo : la piece finie aprés nettoyage




achévement

Préparer
 
La jupe ancienne doit être entiérement dégagée jusqu’au tissus de verre, partout ou une stratif devra se coller.

Le petit plancher est cassé au ciseau et marteau (dommage pour les lattes..) et j’y découvre des couches variées de remplissage (dans l’ordre de décapage) :
panneau de lattes minces, sika noir de collage, espace vide rempli de liquide nauséabond, stratif, résine, mousse de remplissage, tissus, mastic, résine coulée par gravité..nouveau liquide nauséabond..Le chantier avait tout utilisé ! un jour de boulot pour nettoyer.

Un meulage final permet de mettre a l’air la stratif d’origine.  
 
Fixer et finir
 
La piece ayant été prévue 5cm trop large, elle doit s’appliquer au coqueron, avec un jour nul ou minime. Des sangles permettent d’appliquer le joint pendant le travail.

Ouvrir tout ce qui permet l’accès au travail intérieur : futurs coffres, trous d’accessoires (aérateurs..)

Dans mon cas, le haut est appliqué au tableau et se boulonne grâce aux accastillages divers : cadènes de pataras, panneau de nom, aérateurs, la pièce ne peut plus bouger.

Ajouter les entretoises en cp sous planchers et la ou ça plie, stratifier a la louche les angles de tout ça.

Appliquer le collage de l’arête en joint congé épais à l’intérieur : colle époxy ou choucroute polyester, ajouter une ou deux couches de strat en « charnière »
 
Il ne reste plus qu’a couper le débord, poncer un peu l’angle. Si vous avez de la chance aucune retouche de gelcoat ou peinture n’est nécessaire, les 5mm douteux seront recouverts par le profil de protection.
 
Photo : renforts de tissus entre coqueron et piece




terminé!

Rester ensuite longuement devant le travail fait,  avant de commencer tout perçage, car vous ne la verrez plus jamais aussi belle !! ( :>)
Photo : rien a dire